Un court extrait d'un compte rendu de l'Académie des Sciences datant de 1856 et dans lequel Louis Vilmorin fait part de son étonnement quand à certains des résultats qu'il obtient en cherchant à sélectionner une race de betteraves sucrières.
Un texte historique qui permet de situer les travaux de Mendel dans leur contexte et qui peut servir de point de départ pour plusieurs réflexions. (Le texte complet est accessible sur le site de la BNF)
PHYSIOLOGIE. ÉCONOMIE RURALE. - Note sur la création d'une nouvelle race de betteraves à sucre. - Considérations sur l'hérédité dans les végétaux ; par M. Louis Vilmorin. (in Comptes Rendus des séances hebdomadaires de I'Académie des Sciences, 43 (1856), 1859, p. 871-874.)
[...] " Ayant donc maintenant un moyen à la fois très-rapide et très-correct d'apprécier la densité du jus des racines sur lesquelles j'opère, j'ai pu aborder avec assurance l'étude de la question fondamentale de cette expérience : celle de la transmission héréditaire de la qualité sucrée. J'emploie à dessein ce dernier mot, car de nombreuses vérifications m'ont prouvé que dès que l'on arrive dans les densités moyennes, et à plus forte raison dans les densités élevées, la proportion relative des matières denses solubles, étrangères au sucre, qui peuvent se trouver dans le jus, suit une marche décroissante, si bien qu'en soumettant les densités observées à une correction uniforme et égale à celle que fournit la moyenne des observations, on est toujours sûr que la richesse réelle est supérieure à la richesse calculée.
" Or cette transmission s'est opérée à un degré qui a dépassé mon attente : ainsi, dès la deuxième génération, j'ai vu la moyenne de quelques-uns des lots, descendant de plantes riches, s'élever au niveau des maxima de la première année. En continuant cette marche, j'ai vu naître, à la troisième génération, des plantes dont le jus marquait la densité 1,087, ce qui répondrait (sans correction) à 21 pour 100 de sucre, et d'autres lots, dont la moyenne a fourni 1,075, qui répondrait de même à 16 pour 100, tandis que dans le même terrain, dans les mêmes conditions de culture, des plantes non soumises à cette méthode d'amélioration ne présentaient pour maximum que 1,066, et comme moyenne que 1,042. Le fait de la transmission héréditaire de la qualité sucrée est donc positivement acquis maintenant, et la possibilité de créer et de figer une race riche ne fait plus de doute.
" Mais il s'est présenté, relativement à cette faculté de transmission, des exceptions remarquables et qui jettent un grand jour sur la question générale de la transmission des caractères dans les végétaux. Ainsi dans la première année de l'expérience, et, lorsque j'ignorais par conséquent complétement les qualités qu'avaient pu posséder les ancêtres (1) des plantes sur lesquelles j'opérais, il m'est arrivé de conserver pour la reproduction des racines d'égale richesse, et de voir que la descendance de ces racines donnait :
" Tantôt un lot à moyenne très-élevée et sans écarts prononcés ;
" Tantôt, avec une moyenne plus basse, des écarts considérables produisant ainsi des maxima exceptionnels ;
" Tantôt, enfin, des lots décidément mauvais et dont la descendance devait être complétement abandonnée.
[...]
(1) La puissance de transmission des caractères étant le point essentiel à déterminer, on conçoit combien il était nécessaire de récolter séparément les graines de chaque plante ; cela m'a amené à posséder un état civil et une généalogie parfaitement correcte de toutes mes plantes depuis le commencement de l'expérience. Cette méthode un peu minutieuse, mais qui ne présente aucune difficulté quand une fois on a adopté un cadre bien régulier, est la seule qui permette de voir clair dans les faits qui se rapportent à l'hérédité. Les végétaux dans lesquels les deux sexes sont réunis dans le même individu sont, du reste, admirablement propres à l'étude des questions de cette nature.